Soph 3:14-18
Phil 4:4-7
Luc 3:7-18
Réjouissez-vous. Soyez joyeux. Tel est
le message de Paul, dans la fin de l'épître aux Philippiens. Manifestez
de la douceur envers tous. Ne vous inquiétez de rien. Et la paix de Dieu
gardera vos coeurs. Voilà un message qui a de quoi nous satisfaire. Voilà
une bonne nouvelle, agréable à entendre. Eclatez
de joie. Poussez des acclamations. Réjouissez-vous. Voilà le message
de Sophonie, dans la fin de son livre. Dieu a retiré vos condamnations.
Il a fait fuir vos ennemis. N'aie pas peur, ville de Sion, Le Seigneur ton Dieu
est avec toi. Voilà une bonne nouvelle, agréable à entendre.
Et l'évangéliste Luc nous dit que
Jean annonçait la bonne nouvelle au peuple, au peuple qui se pressait
sur les bords du Jourdain pour venir l'écouter et se faire baptiser.
Ce message devait donc être aussi réjouissant, agréable
à entendre que ceux de Paul plus tard, ou de Sophonie bien avant.
Voilà donc comment commençait la
bonne nouvelle de Jean, le baptiseur : Race de vipères. Réjouissant,
n'est-ce pas, de se faire appeler tous indifféremment : race de vipères.
On peut certainement recevoir bonne nouvelle plus agréable. Jean n'usait
pas de flatterie envers ceux qui étaient venus à lui, dans le
désert, au bord du Jourdain. Ils avaient fait l'effort de se déplacer,
de venir au bout du monde pour écouter Jean et se faire baptiser par
lui. Et voilà ce qu'ils reçoivent tous, quels qu'ils soient, ensemble
: race de vipères. Quel encouragement ! Et pourtant ils sont là,
fatigués peut-être du voyage, espérant quelque chose. Ils
sont là, au vu et su de tout le monde. Et quand, avides, il écoutent
Jean, leurs oreilles retentissent de cette apostrophe : race de vipères.
Race de vipères : que comprenaient ceux
qui écoutaient Jean ? Que comprenons-nous quand Jean nous dit la
même chose, à nous qui sommes venus ce matin, à nous qui
nous sommes déplacés, qui avons fait l'effort de nous lever matin,
qui avons organisé notre journée en fonction de ce moment ?
J'ai essayé de chercher quel pouvait bien
être les sens symboliques possibles des vipères. Celui qui me paraît
le plus plausible, le plus vraisemblable, serait le suivant : la duplicité,
l'hypocrisie. Jean les accuserait, nous accuserait, d'hypocrisie, de duplicité.
Voyons ce qu'il dit. Voyons l'alternative qu'il
propose, l'opposition qu'il fait. Il voit ses interlocuteurs comme des gens
qui essayent d'échapper à la colère à venir, qui
cherchent à la fuir. Et il leur demande de produire des fruits dignes
de la repentance. Son baptême est un baptême de repentance.
Ce baptême n'est pas une échappatoire.
Il n'est pas un moyen de s'épargner un quelconque jugement. Jean imagine
un calcul de la part de ceux qui viennent à lui. Viendraient-ils pour,
grâce au baptême de Jean, être à nouveau bien avec
Dieu ? Par ce baptême, chercheraient-ils, eux tous, à se garantir
de Dieu, de sa Sainteté, de sa colère ? Auraient-ils besoin
d'une assurance relativement bon marché, d'une amnistie baptismale, d'un
parapluie ouvert ?
D'ailleurs cela, ils pensent l'avoir. Il sont
Fils d'Abraham. Quelle carte de visite ! Quel certificat ! Certificat
d'origine contrôlée, certificat d'assurance, certificat de bonne
conduite. Vraiment ? Non, non, dit Jean. Cela ne vaut rien. D'ailleurs,
Dieu pourrait susciter des enfants d'Abraham de ces pierres, là.
Et pourtant ils sont venus vers Jean. Donc, ils
ne lui faisaient pas trop confiance, à leur certificat, au sang qui coule
dans leurs veines. Ils avaient besoin d'autre chose. Sans doute, sans bien le
comprendre. Ils avaient besoin de se rapprocher de Dieu.
Voilà ce que Jean veut dire. La religion,
la religion de Dieu, ce n'est pas vouloir se couvrir, se protéger, se
garantir, se racheter d'une quelconque responsabilité, d'un jugement,
c'est une relation personnelle avec Dieu, un contact sans cesse renouvelé.
Voilà ce dont ils ont besoin. La repentance, le retournement, le nouveau
départ en direction de Dieu, avec Dieu.
La hache, la cognée, est déjà
à la racine des arbres. Dieu est prêt à éprouver
les coeurs, les motivations. Il constatera quelles elles sont. Il verra celles
qui tiennent, celles qui sont sources de vie, et celles qui s'effondrent, qui
sont source de mort, celles qui ne mènent à rien, et celles qui
portent des fruits.
Que sont les fruits ? Ils sont des résultats,
pas des moyens. Ils ne sont pas le moyen de se tourner, de se retourner, vers
Dieu, mais le résultat de ce virage, de cette repentance. Mais la question
de la foule est ambiguë. On ne sait pas si elle a déjà compris
ça. Si elle demande : que ferons-nous ? Est-ce : que ferons
nous afin de nous satisfaire Dieu, ou bien : que ferons-nous maintenant
que nous nous sommes tournés vers Dieu ?
Et Luc cite quatre exemples de conduite possibles
: le partage des deux tuniques, du repas, le percepteur et le soldat.
Je vous laisserai simplement deux remarques sur
le premier exemple, le partage des deux tuniques.
Il est demandé de partager, certes. Mais
il est demandé à celui qui a deux tuniques de partager avec celui
qui n'en a pas. Notez bien qu'il n'est ici rien demandé à
celui qui n'a qu'une tunique.
Deuxième remarque : que peut-on dire de
celui qui a à sa disposition deux tuniques. On peut dire qu'il est prévoyant,
qu'il a su prendre ses précautions. Bon point pour lui. Eh bien, non.
C'est un mauvais point. Cela signifie qu'il ne compte que sur sa prévoyance,
sur sa sagesse, sur ses efforts, et qu'il ne place pas sa confiance en Dieu.
Et je sais qu'il est difficile de ne pas agir ainsi. Et pourtant, rappelez-vous
de la parabole dite du riche insensé, où la question posée
était : à quoi tout cela sert-il ?
La foule pose une autre question, à laquelle
Jean répond aussitôt, et de manière constante tout au long
de son ministère : il n'est pas le Christ. D'ailleurs, il oppose
deux baptêmes, le sien, le baptême d'eau, le baptême de la
repentance, le baptême qui marque le retour vers Dieu, la conversion,
le changement de cap d'une vie ; et le baptême du Saint Esprit, qui porte
les fruits, qui fournit la puissance pour les accomplir. Car il n'est pas possible
à un homme normal, naturel disent certains théologiens, d'accomplir
même simplement ce que demandait Jean. Mais à Dieu tout est possible.
Tout est possible à celui qui s'en remet à Dieu, qui place en
lui sa confiance, son assurance, qui vit de sa présence, de sa puissance.
Nos vies sont alors placées face au Christ.
Que vaudra alors notre repentance ? Jean utilise l'image de la séparation
du blé et de la paille. Il ne s'agit pas pour nous ce matin de regarder
le voisin pour savoir s'il vaut de la paille ou du grain. Il s'agit pour nous
de nous examiner nous mêmes à la lumière de l'Evangile,
à la lumière de l'amour de Dieu, d'examiner notre propre sincérité,
notre propre vérité face à celui qui est la Vérité.
Que sont nos actions ? Sont-ce des fruits dignes de la repentance ?
Chacun de nous connaît ses feux de paille. Chacun de nous connaît
ce qui n'a mené à rien, ce qui a été futile, inutile,
nuisible. Chacun sait ce qui dans sa vie a été comme de la paille,
et qui est déjà brûlé. La Parole de ce jour nous
demande après cet examen, de laisser tout ceci, de l'abandonner, de choisir
la compagnie de Dieu, celle du Christ et l'accompagnement de l'Esprit, de vivre
les fruits dignes de la repentance.
Mais alors, cet examen nous révélera-t-il
aussi ce qu'ont été les fruits dignes de la repentance, les fruits
d'un véritable chemin avec le Seigneur ? Pas nécessairement.
D'abord autant il est assez facile après coup d'identifier la vanité,
les choses vaines, autant les fruits de la repentance appartiennent à
Dieu et à son Esprit, et notre rôle ne nous apparaît pas
toujours. Ce n'est d'ailleurs sans doute pas une mauvaise chose. Quoi de plus
dangereux que de risquer de devenir orgueilleux des fruits de la repentance !
Incapables que nous sommes, nous nous vanterions de ce que l'Esprit a accompli,
par nous, soit, mais tout de même. Où peut se cacher aussi la vanité !
Jésus nous l'a bien dit, nous ne sommes,
quand nous marchons avec lui, que des serviteurs inutiles, qui ne faisons que
ce que nous avons à faire, non plus par devoir, mais par nouvelle nature.
Non pas pour mériter, acquérir, gagner, mais simplement parce
que nous sommes ce que la repentance a fait de nous, ce que l'Esprit a fait
en nous, ce que l'Amour de Dieu fait par nous.
La voilà, la Bonne Nouvelle de Jean, comme
nous la comprenons après la venue du Messie : La repentance et le
Saint Esprit pour changer l'homme. Ce Christ qui vient après Jean va
faire de ceux qui le suivent des nouvelles créatures, qui laisseront
les choses vaines pour une relation véritable avec Dieu, qui porte des
fruits.
Revenons à nous. Que sommes nous venus
faire ici ce matin ? Pourquoi, pour quoi sommes nous dans ce temple ?
Est-il possible que nous soyons ici avec l'idée
de tenter de nous concilier Dieu ? de l'amadouer ? avec l'idée
de tenter de rattraper la semaine passée, ou le mois, ou l'année ?
Ou bien pensons-nous que ça ne peut pas faire de mal d'être venu,
que nous sentirons sans doute mieux en sortant de ce culte, alors que Noël
approche ? Ou alors, et cela résume peut-être les autres formulations,
sommes-nous venus ici ce matin avec l'idée de nous garantir d'une éventuelle
colère d'un Dieu, que par ailleurs nous souhaitons le plus loin possible
de nous, de notre vie et de sa conduite ? S'il sont vrais pour certains,
vous comprenez bien que ces arguments ne représentent pas la Bonne Nouvelle
que Jean annonçait.
Le Dieu de Jean, le Dieu de Jésus, celui
qui envoie le Saint-Esprit, n'a rien à voir avec ces sentiments, ces
motivations. C'est un Dieu d'amour, de relation personnelle, de communication
véritable, de communion. Il veut de vrais contacts, et non des faux-fuyants.
Alors, sommes-nous venus ici ce matin pour chercher à renouveler le contact
avec Lui, à nous rapprocher de Lui, à nous retrouver, ensemble,
avec Lui, autour de Lui, de son Fils dont nous célébrons l'attente,
cherchons-nous un nouveau souffle, cherchons-nous à être à
nouveau plein de l'Esprit Saint pour porter encore plus de fruits, des fruits
dignes de la repentance.
La voilà la Bonne Nouvelle que Jean prêchait,
avec beaucoup d'autres exhortations.
Alors, avec Sophonie, pousse des cris de joie,
lance des clameurs, réjouis-toi. L'Eternel a écarté de
toi les jugements, il a détourné l'ennemi, ton ennemi intérieur,
le péché, la vanité mais aussi la mauvaise conscience,
et la trop bonne conscience. Il est avec toi, et Il fera de toi sa plus grande
joie.
Alors avec Paul, réjouis-toi. Que ta douceur,
un des fruits de l'Esprit, soit connue de tous.
Et la Paix de Dieu gardera vos coeurs et vos pensées
en Christ Jésus.
Amen.