Poitiers, 19 août 2001

Jérémie 38:2-13
Hébreux 12:1-4
Luc 12:49-53
Psaume 40

Vacances obligent, c'est la troisième fois que je suis confronté à ces textes. Après avoir prêché une fois sur le texte de Luc, et une autre fois sur celui de Jérémie, je partirai aujourd'hui du Psaume que notre liste nous propose.

Je n'entrerai pas dans le débat de savoir si ce texte est effectivement de David lui-même ou pas. D'ailleurs la question n'a qu'un intérêt très secondaire. De toutes façons, il est au moins attribué à David.
Je ne vous rappelerai pas la vie mouvementée de David telle que nous la rapportent les textes bibliques.Il suffira simplement de se souvenir qu'elle fut effectivement mouvementée, tantôt simple berger, puis héros, puis proscrit, puis roi, puis à nouveau chassé, puis à nouveau roi, presque perpétuellement en guerre, mais toujours croyant, à la fois retors et fidèle à la Parole de l'Eternel, trompeur et trompé, mais à la fin toujours sincère dans la repentance et s'appuyant sur la grâce de son Dieu. Telle fut la vie du héros du peuple d'Israël, d'où viendra le Messie.

Nous ne sommes pas roi, nous ne sommes pas proscrits. Mais sommes-nous vraiment si loin de cette vie là ? Sinon, à quoi rimerait notre liturgie dominicale de confession des péchés et d'annonce du pardon de Dieu ? Puisque par certains côtés au moins, nous avons des points communs avec lui, essayons de prendre ce psaume à notre compte.

Le texte nous y aide, étant écrit à la première personne. Après 4 versets où Dieu est désigné à la troisième personne, le psaume est une prière qui s'adresse directement à Lui.

Un découpage possible est le suivant : une première partie, jusqu'au verset 7, est une louange à Dieu et une confession de foi. La psalmiste y reconnaît l'intervention de Dieu dans sa vie. Il le chante et le loue pour cela. Mieux vaut la confiance du Seigneur que la parole des menteurs. Il n'a pas d'exigence préalable. Dans la deuxième partie, le psalmiste proclame sa foi et ne veut pas la taire. Il veut que le salut de l'Eternel soit connu. La troisième partie est une double affirmation, d'abord l'indignité du psalmiste, et la puissance du salut de Dieu.

Reprenons un peu en détail.
Il est des psaumes qui chantent Dieu dans l'univers. Celui-ci chante Dieu parce qu'il est intervenu dans la vie du psalmiste. Sa situation était des plus pénibles. Les images sont fortes : le cri, la fosse de destruction, les pieds faibles, les pas chancelants. Nous aurions nous aussi des images semblables. Il arrive souvent d'entendre l'expression : je suis au fond du gouffre. Mais voilà, le psalmiste s'est tourné vers l'Eternel, il a eu confiance en son Dieu. Et celui-ci l'a relevé. Au point que la louange est sortie de sa bouche par un cantique nouveau. Au point que cela s'est su et en a étonné plus d'un. Au point que d'autres aussi ont placé leur confiance dans ce même Dieu, au lieu d'écouter les arrogants et les menteurs, le beaux parleurs. La part, la participation de Dieu dans notre vie personnelle a-t-elle eu pour résultat la louange, et a-t-elle déteint sur notre entourage ?
La voici cette louange, ce cantique : Les merveilles de Dieu sont incomparables et innombrables. Et elles n'ont pas exigées de sacrifice et d'offrande, elles sont gratuites.

Le psalmiste rappelle alors ce qu'il affirme. A partir de la parole reçue, le rouleau du livre, il se soumet à la volonté de Dieu, et annonce ce salut qu'il a reçu et dont il vit. Attention, cette obéissance n'est pas ici une condition du salut et de la fidélité de Dieu. Surtout pas. Elle en est simplement une conséquence. C'est parce que ce Dieu-là l'écoute et est présent, que le psalmiste prend plaisir à faire sa volonté. Nous pourrions nous interroger sur ce qui motive notre obéissance à la Parole du Seigneur. Nous pourrions aussi nous interroger sur la publicité que nous donnons à cet aspect de notre existence.

Le psalmiste poursuit en affirmant sa certitude de l'intervention divine, malgré les ennemis qui l'entourent, et malgré ses fautes. Car il ne manque ni des uns ni des autres. Et pourtant il vient juste d'affirmer que Dieu est le Dieu de son salut, et que tout va pour le mieux. Drôle de façon de voir les choses. Des problèmes gros comme une montagne, des péchés noirs comme un ciel d'orage, et sa confiance est encore et toujours en Dieu. Mais il sait regarder au delà. Son appel à l'aide est sa bouée de secours. Pas forcément facile, de compter sur Dieu, malgré tout. Pas forcément facile de négliger les Ah ! Ah ! moqueurs. Pas facile de chanter : Exalté soit l'Eternel ! Mon Dieu ne tarde pas ! Et pourtant c'est ce qu'il fait. On dirait dans les journaux : c'est son secret du bonheur.
La fin de ce passage est reprise presque mot à mot dans le psaume 70, sans doute pour une utilisation liturgique, comme nous le faisons si souvent.

Je vais maintenant reprendre deux points qui me semblent importants.
Tout d'abord autour du verset 7.
Un point de détail : les oreilles ouvertes, ou percées. Plusieurs compréhensions possibles. Soit comme on le retrouve ailleurs dans l'Ancien Testament, le percement des oreilles de celui qui se met au service de quelqu'un à vie, un signe d'obéissance et de fidélité. Soit plus traditionnellement, les oreilles ouvertes pour dire que la faculté de comprendre est donnée.
Donc, verset 7 : ni sacrifice, ni offrande désirés, ni holocauste, ni sacrifice d'expiation demandés. Qu'est-ce à dire ? Que le salut de Dieu, que son intervention, n'est pas lié à ce que le psalmiste pourrait avoir fait pour le mériter. Pas plus le psalmiste que nous d'ailleurs. Le salut que Dieu offre est gratuit. Ce motto de la Réforme est essentiel. Le salut n'est pas à vendre. Pas d'indulgence pour les indulgences. Dieu n'exige rien. Sauf de se confier en lui. Sauf de faire appel à Lui. Alors, ne compte pas arriver devant Dieu en disant : Voyons, tu sais bien tout ce que j'ai fait, tu sais qui je suis, tu me connais. Et oui, Dieu te connait. Autant que tu te connais, d'ailleurs. Il est de loin préférable d'arriver devant Lui avec les versets 12 à 14. Ne pense pas t'être jamais racheté une conduite. Cela n'est pas possible. Mais, Heureux l'homme qui place en l'Eternel sa confiance. Cette confiance, cette fidélité, ce salut de Dieu, il n'est pas possible de les mériter. Les péchés, il est impossible à quiconque de les effacer par un quelconque sacrifice. Les moments sombres de notre vie, il est impossible de les remplacer par des holocaustes ou des offrandes. Seules la compassion, la bienveillance et la vérité de Dieu tiendront.

Et celui qui a réalisé cela dans sa vie, celui à qui Dieu a ouvert l'horizon, a dégagé l'avenir, celui-là est rempli de louange. Toi, qui es ici ce matin, c'est parce que Dieu est intervenu dans ta vie, parce que tu places ta confiance en Lui. C'est bien cela. C'est pour cela que tu le chantes. Ce n'est pas, je l'espère, parce que en venant ici, tu espères monnayer ton salut. Non, ce serait trop bête. Nous sommes donc tous ici parce que nous avons été au bénéfice de l'intervention divine. Et alors, sommes-nous remplis de louange. Ou bien, notre cantique s'est-il un peu affadi, le signal de joie a-t-il un peu perdu de sa puissance ? Parce que lui, le psalmiste, il ne cache pas dans son coeur la justice de Dieu, il parle de sa fidélité, il ne dissimule pas sa bienveillance. Ferions-nous de la dissimulation ?
Non seulement ce passage est un appel à la louange, mais c'est un appel au témoignage, un appel en fait à l'évangélisation. Le salut reçu n'est pas un salut pour soi seul. Il doit être partagé. Comme il est dit au verset 4 : Beaucoup se confieront en l'Eternel. La louange, comme l'annonce du salut sont notre responsabilité de croyant.

Les versets 16 et 17 nous parlent de deux cris : Ah ! Ah ! et Exalté soit l'Eternel !
Bien différents ces cris. La louange et la moquerie.
Mais attention, à quel cri portons-nous le plus d'attention ? Se pourrait-il que nous ayons peur des Ah ! Ah ! Que notre témoignage en soit affecté ? Pour le psalmiste, la stupeur et la confusion ne sont pas du côté du moqué mais du moqueur. Oui, je sais, la moquerie est une arme puissante. Et plus d'un croyant a été amené à reculer face à elle. Mais le cri du psalmiste est : Exalté soit l'Eternel ! Que ce soit aussi notre cri. On dit aussi : Alléluia.

Alors, louons ensemble notre Dieu, louons ensemble l'Eternel. Alléluia.

Amen.

(Philippe Cousson)

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