Lusignan, 22 décembre 2002

2 Sam 7:1-16
Luc 1:26-38
Rom 16:25-27

Nous approchons de la charnière entre deux années, moment en général où se font les bilans et les promesses.
Nous avons devant nous des textes qui sont soit l'un, un bilan, soit l'autre, une promesse, soit les deux à la fois. Nous nous attarderons sur le texte qui concerne David, le roi David.

Au moment où le texte biblique a placé cet épisode, David est devenu roi. Au chapitre 5, il est reconnu roi de Juda et de l'ensemble du peuple d'Israël. Il vient de prendre la ville qui deviendra Jérusalem, et vient d'en faire sa capitale. Le chapitre 6 nous rapporte comment et dans quelles circonstances il a ramené l'Arche de Dieu de l'endroit où elle était, presque oubliée, vers Jérusalem, ville dans laquelle il est entré en dansant devant elle.

Je parle d'épisode placé dans le texte biblique, car les premiers mots du chapitre laissent supposer que ce récit est indépendant, et qu'il a été placé à cet endroit précis, pour des raisons que l'on pourrait chercher à comprendre, parce que son contenu pourrait fort bien être un récit de fin de vie.
Or, le texte tel que nous l'avons, place ensuite tout une succession d'événements dans la vie de David, jusqu'à sa mort et le couronnement de son fils Salomon. Il y aura donc des guerres, des histoires de familles, l'affaire Bath-Chéba, et d'autres choses encore, pas toujours roses. David aura été un homme à la fois fidèle et faible, croyant et trompeur.

David, donc, vient de s'installer à Jérusalem. Il s'est installé dans sa maison, il y a pris du repos, il n'a plus d'ennemis. Il vient de ramener l'arche, rapprochant le lieu de culte vers le lieu de son pouvoir. Et il cherche alors à pérenniser cette situation du culte à Jérusalem. Il veut faire une maison à l'Eternel, une maison de cèdre, comme la sienne, belle et protectrice. Au lieu de cela l'arche est pour l'instant dans une tente.

Le narrateur dit bien que c'est l'Eternel qui a donné du repos à David, qui l'a délivré de tous ses ennemis, et David voit qu'il habite, lui, dans une maison. Il s'adresse à Nathan, cherchant un conseil, ou plutôt une approbation. Approbation qu'il reçoit, puisque Nathan lui répond de faire ce qu'il souhaite faire, bâtir une maison pour Dieu, pour cette arche qu'il a ramenée.

Mais, pour une raison qui lui appartient, cela ne convient pas à Dieu. Il s'adresse alors à son prophète, par deux paroles successives.
La première retourne à David sa question, montrant qu'elle n'était peut-être pas si légitime qu'il y paraissait.
La seconde annonce une promesse sur la postérité de David.
Chacune de ces deux paroles, comme très souvent dans l'Ancien Testament, commence par une évocation du passé, où le Seigneur utilise la première personne : Je, je, je. C'est lui qui a agit, et il le revendique. Cette intervention de Dieu se termine par un engagement de sa part, par une promesse, une promesse qui parle de maison, de règne et de trône.

Et on retrouve ces mots dans le passage de Luc, dans le discours de l'ange à Marie : maison, règne et trône.

Après avoir parcouru rapidement ce texte du deuxième livre de Samuel, revenons un peu à nous. Il nous arrive souvent, soit à l'occasion de dates charnières, comme cette fin d'année, soit à des occasions plus tragiques, accident ou maladie qui nous y obligent, il nous arrive souvent de jeter un oeil sur le passé.
Nous y voyons les heures sombres et les heures joyeuses de notre vie. Nous y voyons ce qui a été fait, et ce qui n'a pas été fait, les chances saisies et les occasions manquées. Selon nos personnalités, nous aurons tendance à minimiser certaines choses, à en amplifier d'autres. Nous aurons tendance à nous glorifier de certaines choses, à maudire l'un ou l'autre pour d'autres choses. Nous aurons tendance à embellir ou à enfouir. Nous aurons tendance à culpabiliser à fond ou à nous dégager de toutes responsabilités. Tout ceci est au fond de nous à des degrés divers.

Mais, comme dirait l'autre, Et Dieu dans tout ça ?
Quelle place faisons-nous dans le bilan provisoire de notre vie, dans cette audit interne de nous mêmes ? En quoi est-il concerné ? Quelle est la place que nous lui avons laissée ?

Dieu pourrait-il avoir sur nous une parole qui soit : j'ai été avec toi, j'ai donné, j'ai planté, j'ai établi, j'ai accordé ? Il est sans doute temps de réaliser que ceci est vrai, que les étapes de notre vie sont toutes, en y réfléchissant bien, marquées de l'intervention divine, discrète ou voyante, cachée ou visible.
Mais, nous le savons bien, nous sommes capables du pire. Ils sont aussi nombreux les moments où nous avons pris les rênes de notre vie, et où cela nous a mené à la catastrophe ou au bord de la catastrophe.
Il est aussi le moment de comprendre que quelle que soit la profondeur à laquelle nous sommes tombés, Dieu a toujours su nous retrouver. Pour peu que nous ayons été prêts à l'écouter, il a toujours été là pour nous relever.
Que dire d'autre ? Si vous restiez persuadés, que vu vos écarts, Dieu ne veut plus de vous, il faut affirmer avec force qu'il n'en est rien. Dieu est là. Il attend, simplement, un regard, un appel, un cri de l'âme.
Mais par contre, si vous en voulez à Dieu de ce qui vous arrive, si vous êtes persuadés que Dieu est responsable du malheur qui vous touche, il vous faut vous rappeler personne ne mérite le bonheur, que comme le disait Paul, il n'y a pas un juste, pas même un seul. Tant que vous reprocherez à Dieu votre sort funeste, vous ne trouverez pas de sortie. Tant que vous penserez innocents de quoi que ce soit, vous resterez fermés au salut. Dieu n'est pas le Dieu du passé, il est le Dieu de l'espérance. Il ne remue pas le passé, il ouvre l'avenir.
Pour vous aussi, Dieu veut faire un récapitulatif de votre vie, en en marquant les bons moments, en ouvrant une espérance, en donnant une promesse.

La promesse que l'Eternel fait à David est celle d'un successeur qui lui bâtira une maison. C'est son fils Salomon qui construira un Temple à Jérusalem. Mais cette promesse va beaucoup plus loin. Elle concerne la postérité de David. Elle concerne la maison, le trône, le règne. De qui, de David bien sûr, d'Israël, mais aussi le monde entier. Et ce successeur, nous le connaissons. C'est Jésus, le Christ. Dans l'annonce faite à Marie, l'ange mentionne à la fois les trois termes de la promesse faite à David : la maison, le règne et le trône.
Le début du verset 14 "Je serai pour lui un père, il sera pour moi un fils" est repris pour Jésus dans Hébreux 1:5.

L'ange parle à Marie de la maison de Jacob. Je rappellerai simplement l'épisode de l'échelle, au moment où il fuyait de chez son père, quand Jacob a déclaré en parlant de l'endroit : "C'est ici la maison de Dieu". A cet endroit il a reçu une promesse dont le caractère universel est clair : "toutes les familles de la terre seront bénies en toi".

Cette maison que David voulait construire, maison de cèdre belle et solide, quelle est-elle à présent ?
Le nombre d'images qui comparent l'Eglise à une maison est suffisamment grand pour que nous comprenions que l'Eglise est justement cette maison, construite par Dieu, avec Jésus-Christ comme pierre angulaire, maison spirituelle, présence de Dieu dans le monde, signe de l'espérance, de la promesse offerte.

Mais alors, cette maison de Dieu, l'Eglise, est-ce que par hasard, nous ne voudrions pas la construire nous-mêmes, l'entretenir nous mêmes, la réparer nous mêmes ? Dans quelle mesure nous voudrions en être les architectes ? Nous la voudrions comme nous l'avons connue. Nous la voudrions comme nous l'avons imaginée ? Comme nous l'avons vue ailleurs ?
Ou bien, cette maison de Dieu, ce lieu de manifestation de l'amour de Dieu, nous le pensons en déclin. Nous avons perdu l'espérance. Nous pensons que les temps sont passés. Qui sait ?
Mais tout ceci, est-ce notre affaire ? Cette Eglise, cette maison de la promesse, n'est-elle pas la maison de Dieu, justement ? Il en est l'architecte, le chef des travaux, le concepteur. Nous n'en sommes que des pierres, parfois effritées, parfois encrassées, parfois menaçant de tomber, mais nous en sommes tout de même des pierres, et elle reste sa maison.

De la même façon que Dieu conduit notre vie, si nous la lui laissons, de même c'est lui qui conduit l'Eglise. Alors, tant pour ce qui concerne notre vie personnelle, familiale, que pour ce qui concerne la vie de l'Eglise, il nous faut lui faire confiance, et prendre pour nous ses promesse. Il faut simplement, l'écouter, s'attendre à lui, et aller là où il nous conduit. Car nous croyons qu'il nous conduit, n'est-ce pas ?
Son Fils est venu, et c'est ce que nous allons fêter à Noël, il est mort et ressuscité, il est vivant, il reviendra, et sa promesse est pour nous, pour nous tous.

Amen.

(Philippe Cousson)

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