Poitiers, 15 novembre 1998

Malachie 3:19-20a
2 Thes 3:7-12
Luc 21:5-19

Qu'il était beau, ce temple. Magnifique, splendide. L'image de ce qui est solide, de ce qui demeure. Et en plus, il était en fonction. On y faisait offrandes et sacrifices. Des belles pierres, et en plus des gens qui allaient et venaient. La vie, quoi. La vie religieuse. Bien installée. C'était beau, non ? Réjouissant, non ? Et pourtant...

Nous en construisons des choses. Nous en organisons des choses. Pour qu'elles durent ? Oui, un peu quand même. Qu'est-ce que nous cherchons alors ? Qu'est-ce que nous préparons ? Parce que, tout cela un jour ou l'autre subira le sort qu'a subit le temple de Jérusalem, un jour de l'an 70. Elles sont belles, encore, nos cathédrales. Elles sont vivantes nos communautés.

Les jours viendront où il ne restera pas une seule pierre posée sur une autre.
Jésus ne dit pas ici que le temple est inutile. Il ne dit pas que la vie religieuse ne sert à rien. Que tout cela ne vaut rien. Il allait au temple. Ce qu'il dit, c'est que tout cela finira. Que le temple d'ici et maintenant, le culte d'ici et maintenant, que tout cela n'est que provisoire. Qu'il ne faut pas en faire l'essentiel.

Alors, les disciples ont un réflexe de connaisseurs de l'Ancien Testament. Destruction du Temple = Jour de l'Eternel, ce jour terrible, jour de justice et de salut. Alors ils demandent un signe. Mais en fait ils en connaissent un certain nombre, mentionnés dans les Ecritures, comme le passage que nous avons lu de Malachie. Ils veulent des précisions, une réponse.

Mais voilà que Jésus, d'abord, s'il leur donne une liste de choses, d'événements, leur dit que ceux-là ne sont pas les signes derniers. Il dit : Ne vous laissez pas tromper. Ne vous effrayez pas. Ce ne sera pas tout de suite la fin du monde.
En fait, des signes annonciateurs, il en donne dans les passages suivants, les uns pour la destruction effective du Temple, les autres pour le retour du Fils de l'Homme. Mais pas dans notre passage d'aujourd'hui.

Revenons donc à ce passage.
Il passe en revue trois catégories d'événements à venir. Les hommes entre eux, les catastrophes naturelles, et enfin le sort des croyants.

Des guerres, des révolutions. Eh oui, il y en a quasiment toujours eu. Nous sommes en paix en France depuis maintenant plus de 50 ans, bien que nos soldats se soient battus ailleurs depuis. Mais nous le savons tous la guerre, la révolte, continuent de sévir ou de menacer toujours et encore quelque part sur la planète. Il y a toujours des hommes, des responsables et des irresponsables, pour penser que la guerre est un moyen de gouvernement, de pouvoir. Nous sommes toujours en face de terres à défendre, de terres partagées, de peuples déchirés, de tyrans. Et malgré le "village global", ce n'est pas encore fini.
Ce n'est pas nouveau, ce n'est pas un signe.

Des catastrophes naturelles, des tremblements de terre, des cyclones, des éruptions volcaniques, des chutes de météorites, des famines, des épidémies, il y en a eu beaucoup durant l'histoire de notre planète, et ce n'est sans doute pas fini.
Ce n'est pas nouveau, ce n'est pas un signe.

Et puis, il prévient les croyants, les disciples, et nous aussi. Vous aurez aussi à subir. La séduction et la persécution.

La séduction, pour ce qui nous concerne maintenant parait plus probable que la persécution. Combien d'hommes sont déjà venus, depuis les temps du Christ en Palestine, pour dire au monde : "Je suis revenu, c'est moi, le Messie", ou bien, "c'est la fin, suivez-moi." Nous en avons tous entendu parler. Soyons sages, et faisons comme les disciples de Bérée, qui chaque jour étudiaient les écritures pour voir si ce qu'on leur disait était exact.

Mais une autre menace a aussi parcouru l'histoire de l'Eglise, ce sont les persécutions. Et même parfois entre chrétiens. Sans doute les plus terribles. Même s'il y en a de moins en moins, il reste sur notre terre des disciples persécutés, violemment ou sournoisement. Il reste des chrétiens pour qui la foi est un combat où leur vie, leur intégrité est en question.

Mais enfin, tout ceci n'est pas non plus nouveau. Ce n'est pas un signe.

Nous pouvons d'ailleurs supposer que les disciples ont fait le lien entre les paroles de Jésus et l'adresse du prophète Azaria au roi Asa, dans 2 Chroniques 15, et qui se termine comme notre passage, par une parole d'encouragement et une promesse.

Et voici maintenant à mon avis le point important pour nous ce matin dans ce passage : Le témoignage. Rendre témoignage pendant la persécution, combattre la séduction, voilà ce qu'il faut. Tenir bon. Parce que pas un cheveu de votre tête ne sera perdu. Ceci est une image bien sûr. Il existera toujours des croyants plus ou moins chauves.

Les persécutions comme occasion de rendre témoignage... Voilà qui peut paraître étrange. Serait-ce que, quand il n'y a pas de persécutions, les croyants ne rendent pas témoignage à la Vérité ? Le croyez-vous ? Sommes-nous une église témoignante, une église évangélisatrice ? Ou nous faudra-t-il une persécution pour le devenir ? Sommes-nous une église théologiquement forte ? Ou faudra-t-il que la séduction et les sectes nous forcent à penser et à rendre notre foi solide ?

Malgré tout ce qui pourrait arriver à l'Eglise, aux disciples, voilà ce que le Christ lui demande, leur demande : témoigner ! Apporter son témoignage à son sujet !
Oui, je sais, notre présence ici ce matin est déjà un témoignage.
Mais cet après-midi, demain... Chez nous, autour de chez nous, au travail...
Se peut-il que nous craignions une persécution qui n'existe pas ? Se peut-il que le risque que nous prendrions soit si grand, qu'il n'en vaille pas la chandelle ? Que l'on sache, que l'on puisse dire : "tu sais, Untel, il est croyant, il est chrétien", éventuellement, "il est protestant". Je place ceci en dernier, car si nous revendiquons notre identité de calviniste, nous défendons et annonçons avant tout Jésus-Christ, et non pas Jean Calvin. Si l'Institution Chrétienne est un livre de base, notre foi s'appuie avant tout sur la Bible, sur les textes du peuple juif et sur les textes des apôtres. C'est là que nous reconnaissons la Parole que Dieu nous adresse.

Nous rendons témoignage au Christ, à sa mort et à sa résurrection, au salut par grâce qu'il nous offre, à Dieu le créateur qui nous aime, à ce que chacun peut vivre en cette compagnie, par cet amour qu'il est appelé à partager et à vivre avec les autres.
Il est bien clair dans ce passage, que le témoignage est d'abord un témoignage en paroles. Le témoignage en actes n'en est un que s'il est accompagné de paroles. Sinon, il n'est au maximum que question. Et susciter des questions pour n'y pas répondre ne peut pas être appelé témoignage.

Gardons à l'esprit la question de Jésus, quelques chapitres avant :"Quand le Fils de l'Homme viendra, trouvera-t-il la foi sur la terre ?" Ou alors, ne trouvera-t-il que de belles cathédrales ? Trouvera-t-il des croyants qui témoignent ? Des croyants qui annoncent ? Car comme disait Paul, "comment croiront-ils en lui sans en avoir entendu parler ? Et comment en entendront-ils parler si personne ne l'annonce". Que voulons laisser, des bâtiments, ou un témoignage explicite ? L'un n'exclut pas l'autre, mais où est l'essentiel ? Qu'est-ce que le Seigneur attend de nous ? Le témoignage, "que l'occasion soit favorable ou non" comme le demande l'épître de Paul à Timothée.

Pour témoigner, pour annoncer, pour prêcher, il faut avoir quelque chose à dire. Le Christ dont on parle, doit avoir été une rencontre, doit être un compagnon, et rester une espérance. Et notre parole doit être de proposer cette rencontre, ce compagnonnage, cette espérance. Et ceci est beaucoup plus qu'un bâtiment, que des rites. Si c'est le Seigneur Jésus Christ qui anime notre vie, cela doit se voir, bien sûr, mais aussi cela doit se savoir.

Si dans la persécution, il ne faudra pas chercher les mots, qui nous seront donnés, d'autant plus dans la paix, rien ne devrait nous retenir de parler, avec sagesse bien sûr, du Sauveur.

"Tenez bon", dit l'Evangile. "Soyez forts, ne vous laissez pas décourager", dit le livres des Chroniques.

Amen.

(Philippe Cousson)

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