Poitiers, 13 mai 2012

1 Jean 4:1-11

Chers frères et soeurs,

A droite et à gauche de la chaire, sous la croix, dans notre temple, il y a ces deux courtes phrases : Dieu est lumière, Dieu est amour.

Confessions de foi simples, mais qui demanderaient des commentaires détaillés. Ces deux expressions sont toutes les deux présentes dans la première épître de Jean, dont le chapitre 4 se trouve dans nos listes pour ce dimanche et pour le dimanche suivant. Vous aurez donc droit dimanche à une suite de la prédication de ce matin.

Le verset 5 du chapitre 1 nous affirme que Dieu est lumière, qu'il nous faut marcher dans la lumière et non dans les ténèbres.
Et le verset 8 de notre chapitre 4 nous dit que Dieu est amour, et que celui qui n'aime pas n'a pas connu Dieu.

Avant de revenir à ce verset 8, je vais essayer de dégager quelques éléments caractéristiques de ces 11 premiers versets.

On y trouve une opposition, comme dans le premier chapitre entre la lumière et les ténèbres. Ici c'est entre ce qui vient de Dieu et ce qui vient du monde, du cosmos.
Les premiers versets nous définissent ce qu'est un esprit qui vient de Dieu, ou à l'inverse du monde.

Ensuite, le texte nous dis que nous sommes de Dieu, parce que nous connaissons Dieu, qui est amour, et quel est cet amour de Dieu. Ces versets insistent beaucoup sur la connaissance, la connaissance des esprits mais surtout la connaissance de Dieu.

Enfin, les versets 2, 3 puis 15 utilisent un mot qui est généralement traduit par confesser, mais dont la forme grecque évoque plutôt le verbe moderne homologuer.

Je reprends donc, comme le reste de l'épître, ce passage joue sur les oppositions : Dieu, le monde, la vérité, l'erreur. Il nous parle de la connaissance de Dieu, de l'esprit de Dieu et de l'amour de Dieu.

Celui qui n'aime pas n'a pas connu Dieu, car Dieu est amour. C'est le verset 8. Il nous présente un aspect de la connaissance de Dieu qui sera développé dans la suite, l'amour.

Il faut compléter cela par ce qui indiqué au verset 2, et ensuite au verset 15, que celui qui connaît Dieu ou son esprit est celui qui confesse, qui homologue, Jésus comme venu de Dieu, venu dans la chair, dans le monde, comme Fils de Dieu. D'ailleurs, si j'en croie quelques commentateurs, il est possible de traduire cette confession, cette homologation de deux façons, l'une précisant l'autre : celui qui confesse Jésus-Christ comme venu dans la chair ou bien qui confesse Jésus comme Christ venu en chair. Celui qui n'homologue pas Jésus ainsi n'est pas de Dieu nous dit le verset suivant. Celui donc qui ne confesse pas Jésus est décrit comme étant du monde, comme celui qui écoute l'esprit de l'erreur, l'esprit de l'Antéchrist.

Connaître l'esprit de la vérité, c'est connaître Dieu, c'est confesser, homologuer Jésus comme venu de Dieu dans le monde, mais c'est aussi en conséquence à partir du verset 7 celui qui aime. Aimons-nous les uns les autres, car l'amour est de Dieu, et celui qui aime est engendré de Dieu et connaît Dieu.

Celui qui est de Dieu, celui qui connaît Dieu, c'est à la fois celui qui confesse Jésus et celui qui aime. Et cela se retrouve dans la définition suivante de l'amour de Dieu pour nous, qui a été manifesté par la venue du Fils pour que nous vivions par lui.

On trouve dans le verset 10 une explication de cette envoi du Fils résumée par ces quelques mots, traduits à peu près ainsi : "comme propitiation au sujet de nos péchés." Ce mot grec hilasmos après avoir été à peu près généralement accepté et compris a de plus en plus de mal à être compris aujourd'hui. Il est parfois traduit par victime expiatoire, victime propitiatoire, sacrifice. Le mot désigne le fait de chercher à se rendre propice les dieux ou les hommes par un acte comme un sacrifice à la suite de fautes commises à leur égard. Pendant des siècles on a ainsi dit qu'il fallait que Jésus meure sur la croix pour Dieu puisse nous pardonner nos péchés. Cette explication correspond moins à notre mode de pensée contemporain. Voyons comment ce message de grâce et de salut pourrait être formulé aujourd'hui sans perdre son sens réel.

L'auteur de l'épître avait à faire face à plusieurs problèmes dans la transmission du message de l'Evangile. Il y avait ceux qui vivaient encore dans la culture du sacrifice et des gestes compensatoires sans lesquels aucun pardon n'était possible. Et il y avait ceux pour qui la solution se trouvait dans une connaissance toujours plus approfondie des mystères et des secrets de la divinité. Les deux influences se faisaient sentir dans l'Eglise naissante, et on retrouve trace dans divers passages du Nouveau Testament.

Ici, l'auteur répond aux deux. Pour ceux qui veulent la connaissance, il répond que la connaissance de Dieu se résume à la confession de Jésus incarné, venu dans la chair, dans le monde, comme Fils, comme Christ et à la vie par l'amour, et en particulier l'amour des disciples. Pour ceux qui veulent des compensations, une propitiation, une expiation, l'amour de Dieu a tout fait, Jésus est venu, il est cette propitiation, tout est fait, il n'y a rien à compenser, rien à faire, simplement aimer. Et encore, il faut bien comprendre ceci, c'est à cause de l'amour parfait de Dieu, de la grâce reçue de Dieu, qu'il est possible, qu'il est demandé d'aimer, non pas pour compenser quoi que ce soit, mais bien pour donner, pour offrir, pour vivre.

Celui qui confesse Jésus Christ incarné est de Dieu, celui qui aime est engendré par Dieu et connaît Dieu. Celui qui n'aime pas n'a pas connu Dieu, car Dieu est amour.

Dieu est lumière et il n'y a aucune obscurité en lui si nous pratiquons la vérité, si nous vivons de sa grâce et de son amour. Aimons donc dans la lumière, puisque Dieu est lumière et que Dieu est amour.

Amen.

(Philippe Cousson)

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